L'abbé Daniel ne restera que deux ans à Caudan, il fut nommé à Palais en juillet 1905 et remplacé par l'abbé Le Garrec, précédemment à Mendon. Dès son arrivée, ce dernier fut confronté à de gros problèmes. Rappelons brièvement la situation de l'Église en cette période troublée. Depuis la révolution, la constitution civile du clergé avait institué une nouvelle Église, l’Église constitutionnelle, ce qui divisera le clergé : le clergé séculier qui appliquait la loi en prêtant le serment « le jour du dimanche après la messe en l'année 1790 », et le clergé réfractaire, une grosse moitié des curés qui refusèrent de faire cette démarche, avec les conséquences auxquelles ils s'exposaient : poursuite, emprisonnement et mort pour beaucoup d'entre eux. Au sud-est de l'ile Madame, une grande croix de galets marque l'endroit où furent ensevelis 274 prêtres réfractaires ; ils moururent d'épuisement, de maladie, de maltraitance à bord de deux anciens navires sur les fameux « pontons de Rochefort ». Chez nous le recteur, l'abbé Thomas, réfractaire, fut arrêté et acheminé vers cette sinistre destination. Avec une probable complicité, il réussit à s'évader lors d'une escale à Belle-Ile et put revenir se cacher dans son ancienne paroisse (à Kerrous paraît-il ?). Entre temps l'abbé Guillou, prêtre constitutionnel avait été nommé à sa place. Les Caudanais ne facilitèrent pas son ministère en boudant les cérémonies...
En 1801 une convention, « le Concordat », fut signé entre le frère de Napoléon 1er et les représentants du Pape Pie VII, stipulant que la « religion apostolique et romaine sera librement exercée en France... le gouvernement assurera un traitement convenable aux évêques et aux curés ». L'abbé Thomas put revenir à la tête de sa paroisse, il dut malgré tout prêter serment entre les mains du Préfet du Morbihan le 27 octobre 1802. Il restera à Caudan jusqu'à sa mort le 3 juin 1813. Durant sa « mise à l'écart » pendant la période révolutionnaire il serait donc resté dans la région et, avec la complicité de la majorité des paroissiens, aurait pu, dans la clandestinité, accomplir quelques-unes des fonctions de son ministère.
Le 9 décembre 1905, la loi de séparation des Églises et de l’État fut adoptée : elle considérait la religion Catholique comme une manifestation individuelle et d'ordre privé, lui laissant toute liberté, mais rompant le Concordat. Toute subvention fut retirée aux ministres du culte, les biens ecclésiastiques confisqués.
Auparavant, le gouvernement d'Émile Combes fut mis en place le 7 juin 1902. Ce gouvernement s'est entre autre, signalé par son anticléricalisme en appliquant avec intransigeance les lois de 1901 et de 1904 sur la liberté d'enseignement. Les congrégations religieuses se virent interdire d'enseigner. À Caudan les filles du Saint Esprit de l'école Saint Joseph durent appliquer la loi mais en se l'adaptant, comme nous le relatent avec humour leurs archives : « les hautes personnalités qui dirigeaient la République jugèrent qu'il fallait expulser les communautés par mesure d'ordre public !... parce qu'on n'était pas plus opportuniste ou radical que modéré, parce qu'on était simplement Catholique et qu'on voulait se grouper pour enseigner, parce qu'on avait choisi d'aimer, d'encourager, de s'unir plutôt que de haïr !... et puis ils avaient le sens esthétique ! Les cornettes blanches, les longues jupes à pli, les voiles et le cliquetis du rosaire avaient su leur déplaire... tant qu'il n'y eut qu'à s'en défaire pour pouvoir enseigner. C'est ainsi qu'on quitte l'habit séculier pour enseigner, mais on resta, bon gré, mal gré filles du Saint Esprit et le grain de Sénevé, qu'à Caudan nous avions semé continua de se développer... », en revêtant la tenue civile qu'elles avaient quittée quelques années auparavant !
De son côté l'abbé Le Garrec dut lui aussi appliquer la loi…