De nos jours, vu la diminution des jeunes prêtres, nous parlons moins de séminaire, en tant que lieu de formation religieuse. Le mot séminaire vient du latin « seminarium », qui veut dire pépinière. Il assimile donc les établissements où doivent être cultivées les vertus sacerdotales au terrain aménagé pour les plantes dont on attend les meilleurs fruits...
Le concile de Trente (1545-1563), concile œcuménique qui opéra la grande réforme catholique décréta « que chaque évêque aurait un séminaire dans son diocèse pour la formation du clergé ».
L’évêché de Vannes aura attendu plus d’un siècle avant d’obéir aux prescriptions du concile. Les hésitations, le peu d’empressement et le nombre impressionnant d’évêques qui se sont succédés dans notre diocèse à cette époque, peuvent expliquer ce retard dans l’application du décret.
En 1574, la ville de Vannes décida de fonder un collège « à l’instar de ceux de Paris ». Ce collège, le collège Saint Yves, sous la direction des jésuites, était ouvert à toute la jeunesse. Aux yeux de l’évêque de l’époque, il semblait « plus avantageux pour le bien général qu’un séminaire dont les bienfaits ne pourraient s’étendre qu’à un nombre limité de sujets ». On y donnait des cours de philosophie et de théologie, mais au fil des années, ce collège n’était plus en mesure d’assurer complètement au clergé la formation demandée par le concile.
En 1660, Eudo de Kerlivio, personnage déjà évoqué dans notre bulletin, entreprit de fonder une maison spéciale où les futurs prêtres « pourraient se retirer, au moins quelque temps, avant de recevoir les ordres ». Devant l’hostilité du clergé qui ne voulut pas contribuer aux dépenses, ce premier projet échoua. Eudo de Kerlivio perdit même son titre de vicaire général. Il revint à la charge et en 1680, réhabilité, il eut la joie d’introduire les « ordinands » dans la maison construite sur la colline du Mené.
Le diocèse de Vannes avait enfin son grand séminaire. Cette institution était loin de sa forme définitive ; les cours de théologie continuaient de se faire au collège Saint Yves, mais un grand pas était fait, le principe d’un stage au séminaire dans la solitude étant admis. Il ne restait plus qu’à prolonger la durée de ce stage.
Le séminaire fut d’abord confié à des prêtres du diocèse. La direction passa en 1701 aux lazaristes qui le gardèrent jusqu’à la révolution, période qui fut bien sûr un tournant dans son histoire : tous ses biens furent confisqués, les professeurs refusèrent de prêter serment à la constitution civile du clergé et « furent jetés sur le pavé ». Une condamnation capitale fut prononcée à l’encontre de l’abbé Pierre-René Rogue, jeune et éminent professeur de théologie. Il fut reconnu et arrêté la nuit de Noël 1795 ; après deux mois de captivité, il fut traduit le 3 mars 1796 devant le tribunal criminel qui le condamna à mort comme prêtre réfractaire. Durant la nuit il écrivit deux lettres une à sa mère et l’autre à ses confrères et convertit par « sa résignation » le sergent qui le gardait. Le lendemain 4 mars, il « reçut le coup de la mort ». Plusieurs personnes s’approchèrent de l’échafaud « et trempèrent dans son sang des linges que l’on distribua comme reliques ». Avec lui d’autres prêtres furent guillotinés dont un de Cléguer, l’abbé Laurent Le Floch.
Le séminaire, devenu lieu public, servait de caserne à l’artillerie. À la suite du concordat de 1801 et la liberté accordée aux évêques d’avoir un séminaire, les cours reprirent en 1804. En 1863, les religieuses de la retraite, installées au Grador et désireuses de venir en ville proposèrent à Mgr Louis Dubreuil de céder leur propriété en échange du séminaire. L’évêque accepta la proposition avec enthousiasme.
En 1909, le séminaire se fixe rue de Calmont-Haut, après que l’évêque, Mgr Alcime Gouraud, eut racheté à l’État les bâtiments d’où les Ursulines venaient d’être chassées. Durant la guerre de 14-18, il servira d’hôpital. En 1935 Mgr Hippolyte Tréhiou (1929-1941) reconstruit les trois quarts du séminaire ; il laissera d’ailleurs son nom à la rue où il est implanté. Après l’occupation des années 40, le séminaire recevra de nouvelles générations de séminaristes jusqu’à la crise actuelle des vocations.
Le séminaire ne répond plus à sa vocation initiale et abrite aujourd’hui de nombreux mouvements catholiques et salles de réunion*... (à suivre)
* Source : "Sainte Anne d'Auray" tome III des abbés Jérôme Buléon et Eugène Le Garrec