Août 1944. Après les bombardements et les incendies du bourg, les choses se compliquent. Pour les Religieuses, il n’est plus possible de rester toutes au couvent ; il faut songer à se disperser : un premier groupe part pour Penquesten en « voitures cars Marine », avec meubles, literie… Un deuxième part pour le Gorvello où elles ont encore les locaux qui servaient au camp scolaire ; elles y resteront enseigner aux enfants jusqu’à la fin de la guerre. A Caudan, restent quatre sœurs : la mère supérieure, sœur Hélène, sœur François et sœur Julienne ; elles furent affiliées à la Croix-Rouge, ce qui facilita leur tâche quand elles circulaient dans la campagne… mais la vie au bourg est de plus en plus intenable, elles ne peuvent plus dormir à la communauté et trouvent refuge dans un premier temps à Mané Guillo chez M. le Maire, puis à St Séverin chez Mme le Crenn, et plus tard chez M. Monnier à Kervininen. Les sœurs de Kergoff doivent elles aussi quitter le château qui sera incendié par les bombes quelques jours plus tard…
Bientôt elles ne furent plus que deux à rester, sœurs Hélène et Léonie ; elles durent se retirer à St Sulan dans une villa appartenant à la famille Royant. Elles y restèrent 7 mois durant lesquels elles « n’eurent qu’à louer la gentillesse et la générosité des fermiers qui les entouraient ; pour eux, c’était à savoir qui rendrait le plus service à ces sœurs restées parmi eux pour les consoler et les soigner ». L’abbé Jeffredo et sa servante (Louise Bardouil) se joignirent à elles. Le dimanche l’abbé Jeffredo célébrait deux messes à la chapelle du Trescöet pour les Caudanais qui restaient et les Américains qui se joignaient à eux : « Ils pratiquaient leur foi sans fard ni respect humain ».
Le 7 mai 1945 la guerre se termine, et nos deux religieuses rejoignent le couvent. « Pendant huit jours nous dûmes toutes deux nettoyer la maison pleine de malpropretés de toutes sortes, occasionnées par la troupe et la guerre durant ces 9 mois de la poche de Lorient ; nous arrangeons la chapelle où notre Seigneur vient résider de nouveau. C’est dans cette pièce que pendant deux mois se célébra le Saint Sacrifice de la messe chaque jour ; qu’on administra le baptême et fit les enterrements et comme on ne pouvait monter le cercueil, on le laissait en bas à la porte pendant qu’on célébrait l’office ».
Environ un mois après la fin de la guerre, les habitants évacués purent retourner chez ce qui fut chez eux ! Ils croyaient y trouver ce qu’ils avaient laissé, hélas pour beaucoup ce n’était plus que ruines….comment vivre dans de telles situations ? L’entraide s’organise ; avec l’appui de M. Le Maire, Monsieur Le Léannec, nos deux religieuses aidées de Melle Méheust se mettent au travail : « nous distribuons aux habitants les premiers articles de ménage, la literie ; leur détresse est navrante et leur état bien digne de pitié ».
Les autres religieuses rentrent à leur tour et toutes se mettent à la disposition des malheureux « C’était pour toutes un surcroît de fatigue après une année de dévouement au Grégo mais cette fatigue était compensée par la joie procurée à tous ces gens démunis de tout… ».
Ainsi se termine le récit (condensé) de la vie des religieuses des Filles du St Esprit durant la période 1939-1945 sur la commune de Caudan, grâce aux écrits laissés par l’une d’entre elles. Le but de notre bulletin était de faire connaître et de garder en mémoire cette vie dévouée au service des autres, puisse-t-elle servir d’exemple !...
NB : La photo représente sœur Hélène le 23 avril 1950, jour où elle a reçu la médaille de la Légion d’honneur des mains du Président de la République ; on reconnait M. le Sénateur Maire de Caudan Louis Le Léannec, Monsieur Vincent Auriol… La famille a fait don de cette médaille à la commune. Elle est exposée actuellement à « la maison du souvenir ».