Sur le dernier bulletin d’été nous évoquions le ministère de l’abbé Le Lausque, recteur de notre paroisse. Il a eu le mérite de la remettre « en route » après ces longues années de guerre qui causèrent beaucoup de dégâts matériels mais aussi dans la pratique religieuse. De santé fragile après ses cinq années de captivité, il fut nommé aumônier de l’hôpital d’Hennebont en 1957...

Son successeur fut l’abbé Lancelot, chargé du culte dans la paroisse provisoire de Saint Yves de Kermelo près de Lorient.

Son premier souci fut l’aménagement du presbytère qui avait beaucoup souffert des bombardements et bombes incendiaires ; le budget affecté au dossier immobilier (fonds d’état en dommages de guerre) n’avait, fort heureusement pas été épuisé  en 1946, ce qui lui permit de réaliser des travaux d’intérieur. L’église provisoire en  bois manquait aussi de mobilier et en 1958, le recteur fit l’acquisition d’un catafalque, d’une croix et de chandeliers. On pense qu’il s’agit de la croix qui se trouve dans le chœur, quant au catafalque et aux chandeliers ?...
Sur cette photo on reconnaît l'abbé Lancelot et le tablier du maître-autel
Mais le gros chantier, c’était la nouvelle église à construire. Son  financement provenait des dommages de guerre (en compensation de l’ancienne), estimés à 80 millions de francs (anciens...), somme jugée dérisoire par Monsieur le Maire de l’époque, Louis Le Léannec, qui à force d’interventions obtint de la faire monter à 115 millions en 1959. Monsieur le recteur, devant le coût de la vie qui augmentait à cette époque, jugeait que ces années d’attente n’avaient eu pour effet que de retarder les travaux…

Messieurs Guillou et son adjoint Lindu furent les architectes retenus. En juin 1958, ils rencontrèrent en mairie, Monsieur le Maire, Monsieur le recteur et note ce dernier : « un artiste du nom de Pellerin. Quelle ne fut pas ma stupéfaction de constater que ce monsieur Pellerin avait déjà été retenu par les architectes pour la décoration de l’église, c'est-à-dire  du Maitre-autel, des fonds baptismaux, du chemin de croix, des vitraux. Les maquettes étaient déjà réalisées. J’ai demandé que la décoration  soit mise au concours. Les œuvres de monsieur Pellerin (pourtant premier du grand prix de Rome en sculpture et professeur des beaux-arts à Rennes !…) ne me plaisent pas du tout. Je serai très heureux de me passer de ses services). Il n’en fut rien.

Au cours d’une carrière couvrant pratiquement un demi siècle, de la libération aux années 1990, Yves Guillou, diplômé d’architecture en 1941, et titulaire de nombreuses hautes distinctions dont la grande médaille d’argent de l’académie d’architecture, a contribué à l’essor de la Bretagne en utilisant ses talents dans un ensemble de programmes très diversifiés : écoles, mairies, équipements publics, logements, hôtels, églises dont celle de Caudan, sa réalisation principale dans l’art sacré. «  Ma belle mère, écrivait-il à l’abbé Lancelot le 9 juin 1960, était une véritable sainte et m’a dit fréquemment combien je devais être heureux d’avoir la chance de construire une église. Elle en était très fière et partageait ma joie… ». Cette lettre lui fut probablement adressée pour le remercier d’avoir eu une pensée particulière lors du décès de la belle mère de monsieur Guillou. Il est vrai (paraît-il) que la construction d’un édifice sacré est (ou était...) le summum d’une carrière d’architecte…

Les premiers travaux étaient prévus le 14 février 1960. « Nous les attendons depuis deux ans au moins… pourquoi tant de retards ? Et pourtant le 23 avril 1950, monsieur Vincent Auriol, Président de la République, lors de visite à Caudan promit aux paroissiens la reconstruction de l’église paroissiale avec priorité sur toutes les autres, immédiatement après celle de Saint Louis Lorient. Or celle-ci est terminée depuis 9 ans déjà !... » (Notes du recteur).

Le recteur fit changer d’affectation au mobilier de l’église, un dommage de guerre de 600 000 francs lui avait été attribué, montant valorisé et monté à plus de deux millions. Il obtint que ce soit l’association diocésaine et son mandataire le recteur de Caudan qui obtienne la propriété de ce dommage. « Avec une église neuve nous risquions autrement d’y entrer avec des ornements en loque, démodés… maintenant nous pouvons, en son temps, acheter tout le nécessaire ». (À suivre…)