Nos archives locales tant paroissiales que communales sont peu prolixes sur les évènements locaux de la seconde guerre mondiale (1939-1945). A l’occasion d’une récente exposition de photos organisée par la ville, le comité organisateur de cette exposition mis en place par madame Morvan, adjointe à la culture, a eu la chance de recevoir de la part des religieuses du Saint Esprit une riche documentation sur cette période. Il nous a semblé intéressant d’en diffuser une large partie dans notre bulletin paroissial ; il eut été dommage que leur attitude et leur action restent dans l’anonymat, car elles méritent d’être connues et diffusées...
Rappelons pour débuter les acteurs et le contexte historique, d’abord les religieuses : les filles du Saint Esprit dont la maison mère est située à St Brieuc se sont installées à Caudan en 1852, elles y resteront 146 années… elles furent appelées par le recteur de l’époque, l’abbé Péron (recteur de 1813 à 1866, soit 53 ans… !), qui leur céda une maison qu’il possédait au bourg (l’ancien « couvent »), avec comme vocation d’instruire les enfants et de soigner les malades. Elles le firent, et de fort belle manière, jusqu’en 1973, date à laquelle l’A.E.P devint propriétaire des bâtiments. Dès lors, elles durent déménager et louer une maison particulière jusqu’à leur départ définitif en 1998.
2 septembre 1939 : la France déclare la guerre à l’Allemagne ; cet été là, une colonie de la région parisienne passait quelques semaines dans les murs de l’école. Sitôt la guerre déclarée, elle quitte précipitamment Caudan pour rejoindre la capitale ; c’est la mobilisation générale et l’école Ste Anne ne peut s’ouvrir faute d’enseignants, les abbés Lallemant et Le Dé étant eux aussi mobilisés ; le maire de l’époque, M. Le Léannec, et la mère supérieure se rendent à St Brieuc pour demander des religieuses en remplacement, elles obtiennent gain de cause et l’école peut s’ouvrir.
La « drôle de guerre » s’éternise, chacun reste sur ses positions ; la ligne « Maginot » fait bonne garde à nos frontières de l’est, mais en juin 40, l’ennemi passe par la Hollande et la Belgique et c’est l’invasion sur la France, la débâcle sur tout le front ; l’avance allemande chasse devant elle des milliers de réfugiés en proie au doute, à la peur.
Et l’ouest de la France, dernier rempart, dut accueillir une foule de ces gens démunis de l’essentiel ; à partir de là, nos religieuses vont faire preuve de courage et d’abnégation et forcer notre admiration. Elles secourent de leur mieux ces pauvres gens en leur donnant asile et nourriture ; le 21 juin, les Allemands entrent à Caudan, ils font peur à cause de la réputation qui les a précédés, le pensionnat est réquisitionné par l’infanterie, ils prennent le grand bâtiment ne laissant que le vieux aux religieuses. Ils quittent ce campement et la rentrée de 1940 peut commencer… seul l’externat est ouvert mais, « dès le 15 septembre, nos pensionnaires arrivent plus nombreuses que jamais. Comment arriver à nourrir tout ce monde, alors que le ravitaillement devient chaque jour de plus en plus difficile, nous nous confions à la divine providence et allons de l’avant ! »…
Dès le mois de juillet les bombardements aériens s’accentuent sur Lorient ; en effet l’amiral Karl Donitz avait choisi Lorient pour y installer son Q.G. et ses sous-marins. Pour faire face aux bombardements alliés il demanda à l’ingénieur Todt de construire des alvéoles indestructibles et c’est ainsi que la base de Kéroman vit le jour en janvier 1941. Ce lieu stratégique restera une cible privilégiée des bombardiers durant toute la guerre.
« Ces bombardements ont surtout lieu le soir à l’heure du souper, dès que l’on entendait les avions vrombir l’appétit s’en allait et le cœur se mettait à battre, aussi pour pouvoir tenir, nous faisions un bon repas à midi et le soir, à l’arrivée des « grands oiseaux » nous nous réfugions dans le sous-sol avec nos pensionnaires et là, on tricotait, on mangeait des châtaignes. Quelle chance pour les écolières de ne pas avoir de devoirs à faire ! »…
(à suivre…)